14/03/2008

Cloverfield > un flim pour tératophiles nostalgiques

"Je sais qu'il est en moi un démon qui ne peut pas mourir" < Cioran

Matt Reeves, 2008

Fait pas bon vivre à NY ces derniers temps... Pas facile d'exorciser le souvenir de leurs Tours Jumelles , pas facile de vivre dans la peur, pas facile d'être encore vivant, surtout si sous les pavés non pas la plage mais la poussière, encore et encore, parce qu'on n'est jamais mieux détruit que par soi-même... Godzilla, ça vous dit quelque chose? Le fils maudit de Little Boy a découvert YouTube en surfant sur Internet: résultat? Et bien... passé l'effet de buzz savamment orchestré (sur la toile justement...), force est de reconnaître que l'effet est assez réussi. Le synopsis tient en deux lignes: quelques amis se réunissent pour fêter le départ au Japon (au hasard...) de l'un des leurs, la fête bat son plein, le caméscope est là pour tout enregistrer sauf que, et c'était pas du tout prévu, un monstre géant s'abat sur Manhattan, surgi d'on ne sait où, et commence à tout fracasser sur son passage... La suite: les humains affolés fuient la grosse terreur extraterrestre, l'armée intervient et tout ce petit monde se fait gentiment humilier. La surprise vient peut-être de là: happy end connais pas... Soyez conscients, chers spectateurs, que si un monstre de plusieurs centaines de mètres de haut s'attaque soudain à vous, alors fuyez et fuyez vite, parce que vous n'avez aucune chance. Et les "héros" l'apprennent à leur dépens, nous entraînant avec eux dans leur course folle vers la mort, avec tout leur enthousiasme de journalistes amateurs chevronnés. Le procédé est grossier, déjà éprouvé dans Blair Witch, parfois assez improbable (le crash d'hélico, quand même...), mais le spectateur se laisse gagner peu à peu par l'urgence de la fuite, et le monstre que l'on ne voit pour ainsi dire jamais acquiert ainsi une présence certaine, l'image de la mort qui rôde, avec l'odeur âcre de la peur qui s'installe sous le siège. Alors oui, forcément ce n'est pas un chef d'oeuvre, les acteurs font souvent penser aux héros pâlichons des séries TV à 10 centimes, et Cloverfield ne cache pas en son sein une critique larvée du pouvoir des images, ni une réflexion souterraine sur le voyeurisme de notre société occidentale, avide à l'envi de voir rouler à nos pieds la tête de la Statue de la Liberté. C'est simplement un film-catastrophe des années 2000, qui réussit le pari de nous effrayer tout en jouant de la réalité passée. Et le plus effrayant, ce qui glace le plus, c'est peut-être encore ça: se rappeler que King Kong, c'était du cinéma, rien que du cinéma. Alors que là...


Jad Wio Monstre-Toi (à prendre ou à laisser)


Aucun commentaire: