17/03/2008

Tabou > un flim pour sabélaphiles orientalistes

"Pour tout ce que nous voulons faire, bien ou mal, nous n'avons que nos dents." < Kafka

Nagisa Oshima, 1999


Oshima n'a plus rien à prouver pour assurer son fauteuil au panthéon des réalisateurs. Décrié, conspué, adulé, il mène depuis un demi_siècle une carrière faite de provocations, scandales et coups d'éclat, à base de popopopops, de jeunesse adulée et d'érotisme magnifiée. Tabou n'échappe pas à la règle: Oshima s'empare du Shinsen Gumi, une milice japonaise légendaire, pour y développer ses thèmes favoris. Le film commence sur le recrutement de deux nouvelles recrues, dont le jeune Sozaburo Kano, dont le charme adolescent va enflammer les coeurs des hommes, et mettre à mal l'unité du groupe. Servi par une photo et une esthétique magnifiques, le film explore les rapports amoureux complexes que font naître le désir charnel. Pouvoir, jalousie et soumission ont toujours été au coeur du cinéma d'Oshima, et il est difficile ici de ne pas penser à Furyo: le très sobre Takeshi Kitano, la musique de Sakamoto, les soldats comme révélateurs de la société... Cinéma gay? Assurément non. Mais il est ainsi plus facile, en plaçant d'emblée les relations dans le cadre strict d'une organisation militaire, de mettre en lumière la perversité des jeux de séduction et d'en dévoiler le caractère jugé ici intrinsèquement conflictuel. Mais là où Furyo s'achevait sur une note d'espoir, un pardon rédempteur, les derniers coups de sabre de Tabou sapent avec délice les fondements de l'amour. Le jeune homme courtisé, victime des assauts amoureux de ses compagnons, se révèle bourreau calculateur, vengeur aux illusions perdues. Illusions, le maître mot d'un film qui ne montre que pour dévoiler le contraire, qui de faux-semblants sème tout chemin, et emmène le concept de yin et de yang en des contrées malsaines. Rien n'est ce qu'il paraît, et le devenir des choses se nourrit davantage de frustrations que de réalisations semble dire le petit monde du Shinsen Gumi proche de sa fin. Oshima guide ici nos pas sur un jardin japonais qui n'a de zen que l'apparence. Le feu couve sous le silence; l'amour y naît dans la forge. Et quand les lois du groupe ne sont pas respectées, les têtes tombent sous la lame du katana.


Photek The Seven Samourai (à prendre ou à laisser)

Aucun commentaire: